Traduction de cet article Par Seth Shostak, Astronome au SETI Institute |
Pour la première fois, les astronomes ont découvert une planète lointaine, qui pourrait être semblable à notre Terre. Ce monde éloigné, qui virvolte autour d'une terne étoile baptisée de façon ingrate Gliese 581, pourrait probablement abriter un paysage qui nous serait vaguement familier - un panorama d'océans et de continents dérivants. Dans ce cas, il y a des chances que ce soit un foyer pour la vie - peut-être même pour une vie évoluée.
Voilà maintenant une douzaine d'années que la première planète tournant autour d'une autre étoile que le soleil a été découverte. Depuis lors, de petites équipes d'astronomes ont débusqué de nouvelles cibles planétaires à un rythme d'environ une toutes les deux semaines. Aujourd'hui, il est facile d'être blasé par cette pluie continue de nouveaux mondes. Avec plus de deux cents planètes au compteur, plus les bruits superflus.
Mais cette planète est différente.
Elle est différente premièrement parce qu'elle est petite. Presque toutes les découvertes antérieures étaient des mondes massifs, avançant lourdement tels des géants comparables à Jupiter ou à Saturne. De tels mastodontes sont presque tous ensevelis sous des atmosphères épaisses et toxiques, et semblent ne pas convenir pour accueillir la vie. Voyez-vous, ce n'est pas parce que la nature préfère créer des planètes bien charpentées, c'est seulement que la technique des vitesses radiales utilisée pour découvrir les exoplanètes favorise fortement les colosses.
Cependant, en mesurant les mouvements d'une étoile dans la catégorie poids coq, tel que la naine rouge Gliese 581, il est possible de découvrir des mondes dans la catégorie poids mi-mouche, puisque leur détectabilité dépend du ratio masse stellaire/masse planétaire. Gliese 581c, qui est le nom de cette toute nouvelle trouvaille, est la plus petite planète jamais découverte autour d'une étoile classique, le diamètre de cette planète est simplement 50% plus élevé que celui de la Terre. Cette taille minuscule suggère (non encore prouvée) que c'est un monde rocheux, comme Vénus, la Terre ou Mars.
Encore un autre coup de chance, il s'avère que cette planète est susceptible d'être - telle la soupe de bébé ours - tout juste à la bonne température. À la différence de la Terre, elle se campronne fermement à Gliese 581. Elle est cinq fois plus proche de sa chétive étoile que ne l'est mercure par rapport au Soleil. En outre, la luminosité de Gliese 581 correspond seulement à quelques pourcents de celle du Soleil. Ces deux facteurs s'annulent approximativement, et un calcul simple suggère que la température moyenne de cette exoplanète est semblable aux zones tempérées de notre Terre.
Représentation de Gliese 581 c, dans l'hypothèse d'une rotation synchrone avec son étoile. Dans ce cas, la planète montrerait toujours la même face à son soleil.
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Figurez vous, qu'une planète aussi proche de son maître stellaire a de très grandes chances d'être en rotation synchrone avec son étoile, avec un coté faisant toujours face à son soleil, et derrière l'autre côté perpétuellement tourné vers la froide obscurité de l'espace. Mais les modèles informatiques suggèrent qu'un tel monde possède une atmosphère, des vents forts diffusent la chaleur de l'hémisphère ensoleillé tout autour de la planète. Il devrait y avoir une bande de températures modérées quelque part aux alentours de la ceinture crépusculaire entre la lumière et l'obscurité. Cette idée a reçu quelques confirmations depuis de récentes mesures infrarouges d'une autre planète nouvellement découverte, un monde en rotation synchrone appelé HD 189733b. Cette géante gazeuse semble montrer une atténuation des différences de température entre sa face sombre et sa face ensoleillé et celà grâce à des vents soufflant à des vitesses élevées.
Ce résultat décisif est passionnant. Parmis les centaines de planètes jusqu'ici découvertes autour d'autres étoiles, Gliese 581c est le meilleur candidat pour en faire une planète habitable. Elle pourrait peut-être revendiquer des agréments terrestres tels que des océans liquides, une atmosphère protectrice, et une tectonique des plaques pour faire remonter le minerai métallique à proximité de sa surface, utile pour tout être évolué ayant un penchant pour la technologie.
Vue d'artiste de Gliese 581 c, d'après l'hypothèse de la planète océan.
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L'environnement pour accueillir la vie pourrait être présent, mais y a-t-il de la vie ? Jusqu'à présent , il n'existe aucun moyen de le savoir à moins que la planète ait engendré des êtres qui soient au moins aussi intelligents que nous le sommes. Dans le cadre du projet Phoenix mené par le SETI Institute, nous avons par deux fois orienté nos grandes antennes en direction de Gliese 581, en espérant enregistrer un signal qui accréditerait la présente d'une technologie non humaine. La première tentative a été faite en 1995, à l'aide du radiotélescope Parkes en Australie, et deux années plus tard des observations complémentaires ont été entreprises à l'aide de l'antenne de 100 mètres de diamètre à Green Bank, Virginie-Occidentale.
Aucune des deux recherches n'ont indiqué la présence d'un signal. Mais naturellement, les extraterrestres pourraient être au courant que nous les écoutons. Peut-être que la puissance de leurs émetteurs était insuffisante pour nos récepteurs, ou peut-être que la bande de fréquences que nous avons couverte, de 1 200 à 3 000 MHz, était le point faible de l'opération de communication. Il existe de multiples explications pour ne pas avoir détecté une émission extraterrestre, mais maintenant que le Allen Telescope Array est construit, cela améliorera considérablement notre capacité à scruter plus précisement ce monde - ainsi que des centaines de milliers d'autres.
Gliese 581 est, en mettant de coté les distances astronomiques qui nous séparent, relativement proche de nous, à seulement 20 années-lumière. C'est l'un des rares système planétaires qui, s'il était habité, pourrait susciter une conversation. Un échange simple, du type «comment allez vous ?» suivi de «bien, et vous ?» exigerait seulement quatre décennies. Ennuyeux, mais pas inconcevable.
Cependant, indépendamment de savoir si le monde satellisé par Gliese 581 soit un endroit avec lequel on pourrait causer ou pas, sa découverte est hautement porteuse de symboles. Au milieu du vingtième siècle, les astronomes débattaient pour savoir si les planètes étaient extraordinairement rares ou aussi fréquentes que des criquets. Nous savons maintenant que les derniers avaient raison, et que le nombre de planètes dans notre propre Galaxie pourrait facilement atteindre les centaines de milliards. Cette dernière découverte est un signal fort qu'un grand nombre de planètes pourraient être tapissées de composés chimiques sales que nous appelons la Vie. La Terre est peut être unique, mais elle pourrait ne pas être un miracle.