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du projet BOINC
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les pas de Seti@home, BOINC est maintenant l'initiateur d'un tournant
dans le domaine de la "cyberscience citoyenne"
Source : The University of California |
Au
commencement, il y avait Seti@home, le premier projet de calcul
partagé à grande échelle
lancé en 1999 avec
le soutien financier de la Planetary Society. En
quelques mois, le projet invita des millions de
bénévoles de part le
monde à se rejoindre pour former le réseau
informatique
le plus puissant jamais réuni. Puis il fût suivi
par d'autres projets répartis dans tous les domaines allant
de la
recherche de grands nombres premiers au repliement des
protéines.
Puis, en 2002, David Anderson, responsable du projet Seti@home, lança BOINC, l'infrastructure ouverte de Berkeley pour le calcul en réseau (Berkeley Open Infrastructure for Network Computing). L'idée était simple, plutôt que les différents projets aient chacun leur propre plate-forme et leur propre communauté de bénévole, on disposait désormais d'une famille grandissante de projets ayant pour point commun la plateforme BOINC. Les bénévoles n'ont plus à souscrire à un projet unique, mais peuvent diviser le temps de leur ordinateur comme ils l'entendent entre les différents projets BOINC.
Mais à l'étage situé juste en dessous du centre névralgique de SETI@home au Space Science Laboratory de Berkeley, une approche différente prenait forme. Un scientifique de la Planetary Society, Andrew Westphal, tentait d'imaginer un procédé efficace qui permettrait de détecter les grains de poussière interstellaire piégés dans le collecteur de la sonde Stardust. Il arriva vite à la conclusion que les ordinateurs ne pourraient pas identifier ces insaisissables particules, mais un œil humain entrainé lui le pourrait. Le seul problème est que pas une seule personne ne peut espérer analyser les millions d'observations microscopiques qui ont été nécessaires pour la numérisation de la totalité du collecteur, tout en conservant sa santé mentale. Inspiré par les réalisations de ses collègues situés quelques bureaux plus loin (Anderson et le directeur scientifique de Seti@home, Dan Werthimer) Westphal s'interrogea : est-il possible d'exploiter les capacités visuelles de milliers de bénévoles, de la même manière que SETI@home le fait avec la puissance des processeurs ?
Il ne fût
pas facile de traduire l'expérience acquise dans le
volontariat informatique vers ce nouveau modèle qui exigeait
la participation active
de bénévoles. Mais avec un travail en
étroite collaboration avec Anderson, et
avec le soutien de la Planetary Society,
Stardust@home débuta en
août 2006. Dans la lignée d'un projet
lancé par le centre de recherche Ames de la NASA
(ClickWorkers) qui
avait pour objectif de rescencer les cratères sur Mars,
Stardust@home
représente la première
génération des projets scientifiques pour
lesquels les membres du public contribuent non plus avec leur temps de
calcul processeur, mais avec la puissance de leur cerveau.
Mais la magnifique
boucle de rétroaction créatrice
du Berkeley Space
Science Laboratory ne s'arrête pas là. Westphal,
qui s'était
initialement inspiré du succès de SETI@home pour
lancer Stardust@home, s'apprête à lui
renvoyer l'ascenseur. De la
même manière que SETI@home a donné
naissance à BOINC, Anderson s'interroge, Stardust@home ne
pourrait-il être le précurseur d'une plate-forme
universelle? Cette fois-ci, au
lieu de faciliter l'émergence de projets sur lesquels les
micro-ordinateurs font tout le travail, la nouvelle plate-forme
permettra aux bénévoles d'utiliser
leurs méninges et leurs compétences pour aider
les projets scientifiques.
Le continent Africain vu de
l'espace
L'image
est le résultat d'une
mosaïque d'observations réalisées par le
satellite Envisat de
l'ESA en Mai 2004.
Source : Agence Spatiale Européenne |
Anderson
et son équipe se mirent au travail et, après
quelques mois, développèrent le
prototype d'une plate-forme visant à faciliter
l'émergence de projets analogues à Stardust@home.
Ils l'appelèrent "Bossa",
qui signifie "Logiciel ouvert de Berkeley pour l'association des
compétences". Sur de nombreux points, Bossa est similaire
à BOINC,
il s'appuie sur l'ensemble des caractéristiques
de la communauté BOINC : les points, la
concurrence, les équipes, et le forum.
La différence tient dans le type de
projets qu'il facilite, le calcul bénévole pour
BOINC, l'association des
compétences pour Bossa. Le raisonnement d'Anderson
est limpide, il existe de nombreux projets scientifiques qui pourraient
potentiellement bénéficier de la combinaison de
l'intelligence et
des compétences du grand public, mais actuellement seule une
infime partie de cette intelligence est exploitée. Bossa
cherche à inverser cette tendance, en facilitant le
lancement par les scientifiques de projets faisant participer le
public, mais
aussi en fournissant un vivier de bénévoles
dévoués. Selon Anderson, la nouvelle
plate-forme est l'étape naturelle vers ce que l'on
appelle la Cyberscience citoyenne.
Bossa
est encore en phase de développement, mais le lancement de
son premier
projet est déjà en préparation.
AfricaMap est une
collaboration entre l'Université des Sciences et des
Technologies de
Kumasi au
Ghana, et l'Université de Genève, l'objectif est
d'examiner des images satellite
du continent africain. Les bénévoles qui
rejoindront AfricaMap analyseront des images haute
résolution de régions africaines
reculées où il n'existe malheureusement
aucune carte, ou quand elles existent ne sont plus à jour.
Leur travail serait de signaler l'emplacement précis
des
routes, les rivières, les villages, etc, et ainsi appuyer
les
efforts visant à aider les régions
pauvres mais également de rendre compte des effets
du
réchauffement climatique sur le paysage du continent. Selon
Anderson,
AfricaMap sera en ligne d'ici quelques mois.
Alors que AfricaMap sera le premier grand test pour Bossa, Anderson a dans ses cartons plusieurs autres projets qui devraient rejoindre la famille Bossa. Il est particulièrement enthousiasmé par un projet qui n'a pas encore de nom; pour la première fois, la Cyberscience citoyenne va s'intéresser à la recherche des origines de l'Homme. La vallée de l'Aouache en Éthiopie abrite l'un des plus riches gisements d'hominidés fossiles au monde, ces fossiles sont parfois vieux de 4 millions d'années. C'est là, qu'en 1974, les paléontologues ont découvert le squelette le plus complet d'un hominidé jamais mis au jour, on l'appela «Lucy». Chaque année durant la saison des pluies, les précipitations emportent la couche supérieure du sol dans la vallée, cette érosion a pour conséquence d'exposer de nouveaux fossiles qui étaient cachés juste sous la surface. C'est alors que les paléontologues parcourent le bassin de l'Aouache riche en fossiles, à la recherche des vestiges des plus anciens de nos ancêtres hominidés. Mais c'est une course contre la montre : l'érosion des sols inhérente à la prochaine pluie ou tempête de sable recouvre bientôt une fois de plus les fossiles. En conséquence, même les chasseurs de fossiles les plus assidus ne peuvent couvrir qu'une petite partie du lit fossilifère avant qu'ils ne soient de nouveau recouverts par la terre et la poussière, et perdus à jamais pour les chercheurs.
"Lucy"
Découverte dans la vallée de la rivière Aouache, Lucy reste le fossile le plus complet d'un hominidé retrouvé en Afrique. Son âge est estimé à 3,2 millions d'années Source : Muséum d'Histoire Naturelle de Houston |
Mais
ceci pourrait changer lorsque le nouveau projet Bossa sera
lancé. La stratégie est
déjà bien huilée, les chercheurs vont
utiliser un drone sans pilote volant
à
basse altitude pour prendre des images haute
résolution du lit fossilifère
immédiatement
après un épisode pluvieux. Par
l'intermédiaire de Bossa, ces images seront
immédiatement
envoyées aux bénévoles du monde entier
qui analyseront ces images sur leur
ordinateur. Tout comme pour Stardust@home où les
bénévoles étaient formés
pour
détecter les traces de particules de poussière
interstellaire, les participants de ce nouveau projet seront
formés pour
reconnaître les
fossiles d'hominidés sur les images, signaler leur
localisation, puis retourner leurs résultats au
quartier général du projet.
Avec ces résultats en
main, les paléontologues pourront réduire
considérablement le
temps nécessaire pour
trouver les fossiles. Avec
un aperçu complet du lit fossilifère, les
paléontologues pourront
se rendre directement vers l'emplacement des fossiles les plus
prometteurs, et les extraire pour une étude plus approfondie
avant
qu'ils ne soient une fois de plus, ensevelis sous la terre. En
substituant des milliers d'yeux de bénévoles
Bossa à travers le
monde au
travail épuisant d'une petite équipe sur place en
Éthiopie, le nouveau
projet pourrait révolutionner la collecte de
d'hominidés fossiles. Il est impossible de dire combien de
précieux fossiles seront
sauvés et
recueillis de cette manière, et ce qu'ils pourraient nous
révéler sur nos origines et sur nos lointains
ancêtres.
Des projets tels que
AfricaMap et la recherche d'hominidés
fossiles sont en tout point similaire à Stardust@home: faire
appel à des
volontaires et à leur capacité à
reconnaître de fins détails sur des images
à haute résolution. Mais, alors qu'il travaille
sur la
mise en œuvre de ces projets sur la plate-forme
expérimentale Bossa, Anderson imagine
déjà des utilisations plus complexes
de la compétence et de l'intelligence des citoyens
bénévoles. Il s'intéresse à
"Rosetta", un projet BOINC déjà bien
établie, géré par
l'Université de
Washington, qui examine le repliement des protéines
sur les ordinateurs des
bénévoles. Les
protéines, de longues chaînes d'acides
aminés, sont des
éléments indispensables à la vie telle
que nous la
connaissons. Afin de
s'acquitter de leurs fonctions, les protéines
doivent
spontanément, et presque instantanément
se replier de manière très précise. Ce
processus, qui se déroule à
plusieurs reprises et de façon
fiable dans les organismes, est un
élément essentiel mais encore mal
compris de la vie. Les scientifiques de Rosetta
étudient le repliement des protéines à
l'aide des ordinateurs des bénévoles afin de
modéliser les repliements admettant la "plus basse
énergie" pour différentes
protéines.
Il
s'avère, toutefois, que les ordinateurs ne sont pas les
seuls capables à pouvoir déterminer le repliement
idéal.
Certains humains
sont doués dans cette activité, si
doués qu'ils peuvent faire mieux que n'importe quel
ordinateur. Cette capacité humaine unique et
précieuse pourrait-elle être exploitée
par la
recherche scientifique par le biais du bénévolat
informatique ? Anderson
et ses partenaires du projet Rosetta le croient.
Ensemble, ils
conçoivent l'équivalent d'un jeu
vidéo en ligne, dans lequel les participant seraient en
concurrence les uns avec les autres dans la recherche du
modèle de repliement admettant la plus
basse énergie pour des protéines
spécifiques. Si le jeu s'avère populaire, ils
espèrent qu'il attirera ces individus uniques qui ont un
"don" pour ce activité complexe. Tous ce
travail sur Bossa et sur ces différentes
applications "m'ont rendu extrêmement enthousiaste"
s'émerveille Anderson. "C'est exactement comme durant
les
premiers jours de BOINC, dit-il, lorsque nous essayions de trouver une
plate-forme
commune unique pour un éventail d'applications
différentes."
Et
que dire de SETI@home, le grand père de tous les projets
cyberscience ? Tout marche encore très fort, le projet
améliore toujours ses capacités de recherche
d'une vie
intelligente
dans l'univers. Au cours des dernières années
SETI@home a commencé à
rassembler des données en utilisant le nouveau
récepteur
multi-faisceaux installé à Arecibo (en
lieu et place du
vieux faisceau unique utilisé
depuis le lancement du projet en 1999). Cela signifie que le
projet peut
maintenant balayer le ciel beaucoup plus vite et beaucoup plus
efficacement qu'auparavant, car il examine
simultanément sept points
différents. En outre, le nouveau
matériel mis en place
permet une recherche beaucoup plus sensible sur une bande de
fréquence 40 fois plus grande qu'auparavant. Le
résultat final est
que le
nouveau SETI@home génère 500 fois plus de
données que précédemment,
environ 300 giga-octets par jour, soit 100 téraoctets
(100000
giga-octets) par an. Selon Erik Korpela, un des scientifiques du
projet, c'est l'équivalent
de la quantité de données stockées
dans la bibliothèque du Congrès…
Installation du
récepteur 7 faisceaux à Arecibo, Avril 2004
Avec ce nouveau récepteur, Seti@home collecte 500 fois plus donnée que précédemment Source : NAIC , Observatoire d'Arecibo, complexe NSF |
SETI@home est toujours
le projet scientifique faisant participer le plus de personne dans
l'histoire, avec 170.000 bénévoles
actifs dans le monde mettant à disposition 320.000
ordinateurs. Mais avec ces
énormes quantités de
données à traiter, le projet est à la
recherche d'encore plus de
volontaires pour se joindre aux recherches. «La nouvelle
génération de
SETI@home est 500 fois plus puissante que tout ce qui a
été fait auparavant" précise
Werthimer. "Cela
signifie que nous avons
500 fois plus de chances de trouver des extraterrestres par rapport
à la recherche SETI@home classique."
Avec des projets allant du projet de calcul volontaire SETI@home au jeu sur ordinateur Rosetta à la pointe de l'innovation, Anderson est optimiste quant aux perspectives futures de la Cyberscience citoyenne. "La plus grande question pour le long terme", ajoute-il, "c'est jusqu'où cette idée pourra t-elle être poussée?" Traditionnellement, explique t'il, les scientifiques conduisent les parties de l'expérience demandant le plus de qualification, de connaissances et de réflexion, tandis que leurs assistants sont affectés à des tâches plus banales. Mais avec la Cyberscience citoyenne, les membres du grand public peuvent réaliser un travail extrêmement complexe et sophistiqué. "Jusqu'où la participation du public pourra t'elle remonter dans la chaîne de la recherche scientifique" explique fasciné Anderson. La réponse, pour le moment, est que personne ne peut le deviner. Mais les nouvelles générations de volontaires repoussent toujours plus loin les frontières de la science citoyenne, il est clair que la limite n'est pas encore atteinte.
Amir Alexander,
Planetary Society
Avec des projets allant du projet de calcul volontaire SETI@home au jeu sur ordinateur Rosetta à la pointe de l'innovation, Anderson est optimiste quant aux perspectives futures de la Cyberscience citoyenne. "La plus grande question pour le long terme", ajoute-il, "c'est jusqu'où cette idée pourra t-elle être poussée?" Traditionnellement, explique t'il, les scientifiques conduisent les parties de l'expérience demandant le plus de qualification, de connaissances et de réflexion, tandis que leurs assistants sont affectés à des tâches plus banales. Mais avec la Cyberscience citoyenne, les membres du grand public peuvent réaliser un travail extrêmement complexe et sophistiqué. "Jusqu'où la participation du public pourra t'elle remonter dans la chaîne de la recherche scientifique" explique fasciné Anderson. La réponse, pour le moment, est que personne ne peut le deviner. Mais les nouvelles générations de volontaires repoussent toujours plus loin les frontières de la science citoyenne, il est clair que la limite n'est pas encore atteinte.
Amir Alexander,
Planetary Society